Éditorial - La multiplication des candidats à la présidentielle : l’individualisme plutôt que l’efficacité politique
L’élection présidentielle de la Vème République est la rencontre d’un homme face au peuple. Soit. Mais il convient que ce dernier propose au pays une véritable vision et une véritable alternative différenciante pour espérer l’emporter. La droite et la gauche ont durant longtemps rythmé cette impression d’alternance avant de se diluer, pour le centre gauche et le centre droit, dans le macronisme.
L’heure de la recomposition, à moins d’un an de l’élection présidentielle, a sonné. Une alternative politique à E. Macron a-t-elle été préparée par les partis politiques ? Difficile à croire, tant tous cherchent à s’en émanciper et proclamer leur différence. A. Hidalgo par l’étiquette « rassemblement de la gauche », A. Montebourg par le souverainisme, X. Bertrand par son ancrage local et l’identité, V. Pécresse par l’écologie. Bref, les partis politiques n’ont pas réussi à faire émerger une ligne politique unique et commune, mais bien des lignes politiques similaires mais pas toujours compatibles que ne pourra trancher que le peuple à l’élection présidentielle, ou l’électorat de droite et de gauche lors de primaires.
Les primaires sont donc tentantes pour désigner le candidat d’un camp. Recommençons ! Après tout, pourquoi changer une méthode qui a échoué ? Élisons donc, à droite comme un gauche, un candidat au programme politique séduisant son camp mais incapable de le rassembler totalement. Les socialistes comme les Républicains en ont déjà fait les frais. L’alternative ? La multiplication des candidatures et la division d’un électorat déjà bien maigre et bien rassemblé autour d’E. Macron.
A droite, il est intéressant de constater combien il est difficile d’être une alternative au Président Macron : plus dur sur la ligne sécuritaire au risque de passer pour lepéniste ? Moins ou plus social au risque de paraître démagogique ?
Ou un peu plus écolo, un peu plus laïcard ou un peu moins interventionniste peut-être ? Pas assez pour marquer sa différence. Le constat est là pour la droite : difficile d’exister face à un Président qui a pris soin de s’accaparer cet électorat et d’asphyxier toute ligne politique différente de la sienne.
Face à cette impasse, nous ne pouvons prédire qu’une fin d’année explosive : aura-t-on un candidat du PS, un candidat EELV, Jean-Luc Mélenchon et Arnaud Montebourg comme candidats à la présidentielle, actant l’énième défaite de la gauche ? Aura-t-on une primaire à droite avec un candidat unique ou un rassemblement autour du candidat le mieux placé pour gêner E. Macron ? La candidature quasi-certaine d’Éric Zemmour va-t-elle morceler l’électorat de Marine Le Pen et relancer la course pour le second tour de l’élection présidentielle ?
Face à ces incertitudes, nous ne pouvons demander qu’une chose aux candidats et aux partis politiques : faire leur travail démocratique et œuvrer pour construire le pluralisme des idées. Construisez des lignes différenciantes à la politique gouvernementale, sur des notions clés comme l’économie, la souveraineté, la justice, l’identité, l’écologie, la gestion de la pandémie et rassemblez-vous autour de ce projet commun, porté par l’homme ou la femme le plus capable de vous mener à la victoire.
L’élection présidentielle de 2022 ne doit pas être noyée par un flot d’individualités aux programmes similaires comme elle semble aujourd’hui l’être. Elle doit proposer des choix clairs et porteurs pour les Français. Voici l’enjeu de la fin d’année. Si ce travail en amont n’est pas effectué et que chaque candidat à droite comme à gauche se démultiplie, leurs voix deviendront inaudibles et le duel Macron / Le Pen aura bien lieu. Tant mieux pour eux, tant pis pour tous les autres.