[Compte-rendu] - Dîner-débat de rentrée avec Hubert VÉDRINE

 
 

Le 17 octobre s’est tenu le dîner-débat de rentrée du Cercle Orion consacré à une soirée spéciale géopolitique en compagnie de M. Hubert VÉDRINE, Ministre des Affaires étrangères de 1997 à 2002. Cette discussion privilégiée a permis d’aborder les défis qui se posent à l’Europe, à l’Occident et au Monde dans le contexte actuel.

La question de la place et des ambitions de l’Europe est stratégique. Or, l’Europe a péché par naïveté ou angélisme en s’ouvrant économiquement sans se donner, dans le même temps, les outils d’une politique commerciale stratégique. Une zone de libre échange et de surcroît un marché unique ne pouvant prospérer au sein d’une économie mondialisée avec plusieurs zones économiques concurrentes qu’en menant des politiques attractives, ce qui implique de posséder un centre de décision politique qui fonctionne.

Le récent rapport remis par Mario DRAGHI entend remettre l’Europe sur les rails de l’économie mondiale. Pour ce faire, il faudra toutefois remédier aux carences dans l’innovation technologique, amender le droit de la concurrence pour permettre l’émergence de « champions européens » et davantage de maturité politique pour coordonner les politiques économiques.

L’euroscepticisme est critiquable car il mine les efforts pour optimiser les économies d’échelle permises par le libre-échange, compte tenu de l’effacement de l’Union européenne dans le domaine de l’économie mondiale et de la géopolitique. Mais l’eurocriticisme est salutaire pour améliorer les politiques européennes prometteuses mais peinant à démontrer leurs vertus dans le contexte actuel.

Plus globalement, alors que les rivalités et conflits sont de plus en plus désinhibés, il convient de revenir à une approche réaliste des relations internationales. Deux grands défis se posent à l’Europe par ailleurs : les flux migratoires qui doivent être mieux régulés et la construction d’une Europe « machiavélienne ». La stratégie de communication d’Ursula VON DER LEYEN à l’amorce de son premier mandat en 2019, déclarant vouloir une « Europe géopolitique », gagnerait à être complétée par une réflexion stratégique alimentant l’action et l’édiction de priorités économiques conformes aux souhaits des Etats membres.

De plus, l’urgence climatique est la grande cause actuelle mondiale qui doit être traitée au niveau des principales zones de libre échange et de l’Union européenne. Il importe d’agir sur les politiques industrielles et commerciales de manière stratégique, ou « machiavélienne », pour décarboner la production des biens et services consommées en Europe.

En outre, le manque de maîtrise de l’Europe se traduit sur la gestion erratique des guerres en Ukraine et au Moyen-Orient. L’illisibilité des positions diplomatiques et la communication hasardeuse de certains dirigeants européens gagnerait à être supplantée par des priorités claires et une action résolue.

Ce dîner-débat de rentrée, inspirant et percutant, a permis d’approfondir ces enjeux d’actualité sans tabou ni langue de bois. Il s’inscrit dans la ligne non politiquement correcte du Cercle Orion déclinée dans sa raison d’être. Dans la continuité de cette séquence qui illustre les enjeux traités par l’Initiative Puissance & Sécurité Globale, le prochain dîner-débat se tiendra le 21 novembre en compagnie de Bertrand BESANCENOT, ancien ambassadeur au Moyen-Orient.