La langue, un élément clé pour l'appartenance européenne

L’Europe semble ne plus faire rêver les peuples. Il semble même y avoir un désamour entre les peuples et l’Europe. La montée des populismes et des nationalismes n’est pas étrangère à cette tendance. Elle explique que le nombre de personnes prêtes à quitter l’Union européenne augmente dans de nombreux pays. La crise du coronavirus n’a pas inversé cette tendance, les réponses à cette crise ayant été nationales et la solidarité beaucoup plus nationale que communautaire.

Que peut-on faire si on veut inverser cette tendance ?

Il faut aller vers une plus forte intégration européenne. Pour cela, un des moyens est d’essayer d’accroître la compréhension et le dialogue entre les peuples. Cette compréhension et ce dialogue peuvent se faire par la langue. L’absence d’une langue commune, même si l’anglais commence à jouer partiellement ce rôle, est un frein au marché unique mais aussi à la libre circulation des personnes et des idées.

Pourquoi les pays de l’Union européenne ne s’accorderaient-ils pas sur une deuxième langue commune apprise dans les écoles par tous les Européens dès leur plus jeune âge ? Il ne s’agirait pas d’essayer de recréer un volapük mais de choisir comme deuxième langue une des langues européennes.

Le choix de cette deuxième langue devrait impliquer les peuples et être effectué par un vote des peuples eux-mêmes au niveau de l’Union européenne.

Ce bilinguisme européen permettrait bien sûr de conserver la langue de chaque pays.

Impossible à réaliser, déjà réalisé, dangereux à réaliser, pas le moment de le réaliser diront les détracteurs de cette idée.

Le premier argument consiste à taxer d’utopie le développement d’une deuxième langue commune européenne en se référant implicitement à l’échec de l’espéranto. Les ambitions sont ici bien moindres. Il s’agit non pas de créer une nouvelle langue mais de prendre une des langues européennes existantes pour en faire la deuxième langue commune à tous.  

Déjà réalisé pourrait-on dire, car l’anglais joue maintenant ce rôle. En fait, l’anglais joue ce rôle dans le monde des affaires, dans le monde scientifique, dans le monde diplomatique et, sous une forme très rudimentaire, dans le monde du tourisme. Mais, il n’y a pas de presse anglaise européenne. Il n’y a pas de chaîne de télévision anglaise européenne. Bien sûr, l’anglais reste une option possible, même s’il est paradoxal de choisir l’anglais pour l’Union européenne alors que les Anglais quittent celle-ci.

Dangereux à réaliser diront certains détracteurs, car dans un vote européen, c’est la langue la plus parlée qui deviendra la deuxième langue européenne. Cela n’est nullement certain si le vote des peuples est à deux tours, le second tour permettant de choisir entre les deux langues arrivées en tête.

Le dernier argument « pas le moment de le réaliser » est un argument très fort. En effet, actuellement la crise du coronavirus est une crise sanitaire et économique qui pose des problèmes à court terme et parler d’une ambition qui mettra plusieurs générations à se mettre en place risque d’être inaudible. Cependant, la crise est un moment privilégié pour réfléchir au futur, que ce soit à l’écologie ou à l’Europe. Bien des certitudes seront contestées. Essayer de retrouver à l’identique l’état antérieur à la crise du coronavirus laisserait passer l’occasion de réfléchir sur l’avenir non seulement à court terme mais aussi à long ou très long terme.