Le momentum des start-up
Le 17 janvier 2022, la société Spendesk a ajouté son nom à la liste des licornes françaises qui en contient aujourd’hui 26[1]. Les licornes sont les sociétés valorisées, lors de leur levée de fonds, plus d’un milliard d’euros. La France a plusieurs années d’avance sur le calendrier avancé en 2019 par le Président Emmanuel Macron qui avait déclaré souhaiter que la France ait 25 licornes avant 2025[2]. La France est dorénavant à la recherche de sa première décacorne (société valorisée, lors de sa levée de fonds, plus de 10 milliards d’euros). Le Président, à l’instar des propositions du Cercle Orion dans le cadre de son rapport Tech&Digital dévoilé dès le 6 décembre 2021[3], souhaite que 10 géants de la tech européen et français, au moins, puissent émerger.
Les outils français au service du développement des start-up
Le développement de ses start up par la France passe notamment par l’émergence et le maintien de statuts fiscaux incitatifs pour les sociétés (tels que les régimes de jeunes entreprises innovantes (JEI), le crédit impôt recherches (CIR) ou bien le crédit d’impôt innovation (CII)…), par la facilitation des financements (via les subventions à travers les acteurs institutionnels que sont la Banque Publique d’Investissement (BPI) créée fin 2012 ou la Caisse des dépôts et consignation (CdC).
La France met également l’accent sur la mise en place des fonds de venture à travers des régimes juridiques et fiscaux stables et incitatifs (pour des raisons de lisibilité les éléments suivants concernent les fonds professionnels de capital investissement ou FPCI, forme actuellement la plus rependue en capital investissement early stage) :
- Réduction d’impôt Madelin pour les investissements réalisés dans les PME de moins de 7 ans à hauteur de 25% (dans un plafond de 100.000 euros de versement effectué), y compris à travers un fonds (à condition que ce dernier respecte un ratio d’investissement dans ce type de société) ;
- Régime particulièrement favorable pour les investisseurs personne physique et personne morale résidentes fiscalement en France en cas de réalisation de plus-value et/ou de distributions réalisées par les fonds : exonération de fiscalité (hors prélèvement sociaux) pour les plus-values en cas de conservation des titres supérieure à 5 ans, exonérations d’impôts sur le revenu pour les personnes physiques porteuses de parts de fonds en cas de conservation supérieure à 5 ans… ;
- Retenues à la source pour les personnes physiques et personnes morales non-résidentes fiscalement en France (pour les plus-values lors de la cession des parts du fonds et les distributions réalisées par les fonds) ;
- Absence de fiscalité des véhicules (à l’image des limited partnership anglosaxon) qui ne sont pas des sujets de fiscaux ;
- Sécurité juridique avec une stabilité des outils et régimes afférents au private equity. La France, afin d’attirer des investisseurs anglosaxons a créée en 2015 la société de libre partenariat (SLP), véhicule dont l’utilisation ne cesse de croître face aux véhicules luxembourgeois venant complété le régime des FPCI.
L’ensemble des outils français s’inscrivent dans un mouvement européen plus large avec notamment une harmonisation des principales règles à travers la directive AIFM en 2011 et MILF II en 2014. Ces outils ont vocation à permettre la pérennité de l’écosystème français ainsi que son développement.
Le momentum du private equity français
L’ensemble des mesures précitées ont vocation à favoriser l’essor des acteurs du private equity français, et cela porte ses fruits, ainsi au premier semestre 2021[1] :
- 10 milliards d’euros ont été levés par les fonds de capital investissement (contre 18,5 milliards d’euros pour l’ensemble de l’année 2020[2]) qui seront investis dans l’écosystème du capital investissement dans les 5 ans ;
- 10,5 milliards d’euros (contre 17,8 milliards d’euros pour l’ensemble de l’année 2020) ont été investis dans 1.167 entreprises (contre 2027 pour l’ensemble de l’année 2020).
Il convient de noter que l’attrait de la France est également visible au travers de ces statistiques. Ainsi en 2021, les fonds ont principalement levé auprès d’investisseurs étrangers principalement auprès de fonds de fonds ou de family office.
Le momentum du private equity français est en cours. La création d’entreprise doit répondre à cet afflux économique nécessaire à l’attrait français sur la scène international. L’ensemble de ces levées de fonds vont irriguer les sociétés notamment de l’écosystème français durant les 5 ou 7 années à venir.
Vers l’essor de superchampions européen
L’Europe appuie ce mouvement avec plus de 100 milliards d’euros levés en Europe en 2021 et une levée record de plus de 680 millions de dollars par Sorare et 500 millions de dollars pour Mirakl et Quantum Square. Les levée records sont suivies de réussite dans le cadre de la transition de start-up à entreprise pérenne, avec par exemple l’introduction en bourse réussie d’OVH.
Ce mouvement français et européen s’inscrit dans un mouvement mondial au sein duquel la France et l’Europe se fond une place derrière les Etats-Unis 330 milliards de dollars levés.
Cependant, l’Europe et la France possèdent des atouts indéniables intrinsèque, par la qualité de leur pépite et extrinsèques avec la saturation des valorisations aux Etats-Unis amenant les investisseurs à rechercher de nouvelles pépites. La France travaille son image depuis 2015 afin de défendre l’idée que les géants de la tech apparaissent partout en utilisant notamment des vitrines tels que le CES de Las Vegas au cours duquel le contingent français est l’un des tout premiers contingents étrangers à partir de 2015.
Le secteur de l’impact en plein essor
Pour le moment, le secteur le plus dynamique est celui de la fintech (services financiers BtoB). Cependant, le secteur de l’impact est de plus en plus demandé et sa mise au premier plan est nécessaire. Ainsi, en juin 2021, il existait 727 start-ups à impact ayant levé plus 4,4 milliards d’euros dont 61% avaient moins de 5 ans[1]. Il existe un mouvement pour reconnaître et favoriser les start-ups à impact[2] dans lequel s’inscrit le Cercle Orion en proposant notamment la création de labels européens[3]. Les fonds early stage connaissent un gain d’attractivité qui pourrait être accru par des mesures fiscales attractives (tel que l’amélioration du dispositif Madelin) comme le propose par exemple France Digitale. Ce mouvement est nécessaire afin de permettre la continuation du mouvement en cours.
Le momentum en cours du private equity mondial dans lequel la France prend toute sa place doit profiter aux start-ups à impact dont l’essor n’est plus à démontrer. Pour ce faire, il convient de faciliter le développement, en parallèle de celui de superchampions, de fonds early stage investissant dans des sociétés moins matures dont le modèle économique est en maturation, comme l’est celui de beaucoup de société à impact.
[1] Voir notamment l’article du Figaro paru le 18 janvier 2022 y relativ (ici).
[2] Voir notamment le message du Président Emmanuel Macron (ici).
[3] Le rapport est disponible ici.
[1] Voir rapport France Invest relatif à l’activité du non-coté en France – 13 octobre 2021 (ici).
[2] Voir rapport France Invest relatif à l’activité du non-coté en France – 23 mars 2021 (ici).
[1] Mapping des startups à impact - France Digitale et BpiFrance - juin 2021
[2] Voir par exemple le manifeste des start-ups françaises édités par France Digitale en novembre 2021.
[3] Voir Rapport Economie et Finance dévoilé le 16 novembre 2021 (ici).